-2 décembre 2021 :
Armée de terre
Le « camouflage adaptatif en milieu terrestre »
(article publié sur www.opex360.com le 29/11/21)
Pour rendre un blindé le plus discret possible aux yeux de l’adversaire, on n’a rien de trouvé de mieux, jusqu’à présent, de le peindre aux couleurs dominantes de l’environnement où il sera déployé [blanc pour la montagne, vert et marron pour les régions tempérées, « sable » pour pour le milieu désertique, etc], ou de le camoufler avec filet sou de branches d’arbres quand cela est possible. Seulement, les paysages d’un même milieu n’étant pas forcément homogènes, ces techniques peuvent vite atteindre leurs limites…
Cela étant, un nouveau camouflage, élaboré par un sous-officier de la Section technique de l’armée de Terre [STAT], avait été dévoilé lors de l’édition 2018 du salon de l’armement terrestre EuroSatory. Inspiré par le cubisme, ce courant artistique imaginé par Georges Braque, il promettait alors d’être dix fois plus efficace que les techniques actuelles. Selon la STAT, il fallait en effet seulement 8 secondes pour repérer un blindé avec l’ancienne livrée, contre plus d’une minute avec le nouvelle.
Toutefois, de nouveaux dispositifs pour rendre les blindés totalement inaperçus, voire leurrer l’adversaire, sont en cours de développement. Ainsi, en 2008, la Direction générale de l’armement [DGA] a lancé le projet Caméléon, qui vise à mettre au point un « système de camouflage adaptif en milieu terrestre ». L’idée est de permettre à un véhicule d’adapter automatiquement sa signature visuelle et infrarouge à son environnement.
Confié à Nexter en 2012, ce programme a donné lieu à un démonstrateur, qui est en cours d’évaluation. Le principe de Caméléon est de recouvrir un véhicule de tuiles connectées qui, divisées en pixels, peuvent afficher huit couleurs différentes, en fonction de l’environnement dans lequel il évolue.
« Caméléon est un système composé d’une peau active [des écrans pixelisés] appliqués sur le blindage du véhicule et d’un logiciel utilisant l’intelligence artificielle. Grâce à ce logiciel, les pixels composant la peau active proposent en temps réel un camouflage [forme et couleur] adapté à l’environnement du véhicule », explique la DGA, pour qui ce dispositif devrait rendre les blindés « pratiquement indétectables à distance, que ce soit dans le domaine du visible ou celui de l’infrarouge thermique ».
Le projet Caméléon avait été présenté à l’occasion de l’édition 2018 du Forum Innovation Défense [FID]. Trois ans plus tard, un démonstrateur est en cours d’évaluation. Plusieurs essais ont ainsi réalisés dans différents environnement et conditions climatiques. A priori, ils ont été concluants puisque la DGA parle désormais d’intégrer un tel dispositif à un véhicule, soit sous la forme d’un kit, constitué d’une bâche souple, soit de manière « native », c’est à dire sous la forme de « pixels durs ».
En outre, et au-délà de la fonction « camouflage », ce dispositif serait également susceptible d’être utilisé pour créer une « fausse signature visuelle » et leurrer ainsi l’adversaire.
Un premier système Caméléon, sous la forme d’un kit souple, devrait équiper un « véhicule existant » à l’horizon 2025/26. Il pourrait être complété par les travaux menés dans le cadre du projet MAGIC [caMouflAGe multI-éChelle], lesquels doivent permettre de réduire la signature thermique d’un blindé, et donc le rendre invisible aux capteurs infrarouge.
Par ailleurs, il est prévu de décliner la technologie du projet Caméléon pour les fantassins.
« À plus long terme, on va essayer d’adapter cette technologie à des fibres souples qu’on pourrait intégrer à un textile ‘intelligent’, ce qui permettrait au fantassin de se fondre dans le décor et longer un mur sans qu’on le voie », fait valoir la DGA. Des travaux allant dans ce sens sont déjà en cours… et un modèle pourrait être prêt en 2030.