-25/28 octobre 2021 :
"Zur Normandie Front"
(deuxième partie)
“Strabokran“ sur plat Sslma 44
Tracteur lourd semi chenillé 18 t. (Sd.Kfz 9) FAMO sur plat SSl
Camion Mercedes 4500 S sur plat SNCF
Camion Ford V 3000 sur plat SSl
(1944 / Époque 2)
(1/87 - par Thomas Seignon)
Pour faire face au débarquement de Normandie, la montée en ligne d’unités de chars lourds allemands s’accompagne naturellement du personnel et des matériels nécessaires à leur maintenance.
Après les chars eux-même, il s’agit maintenant d’embarquer sur voie ferrée certains de ces matériels caractéristiques de la composition des unités de chars lourds de l’armée allemande en 1944.
La « Strabokran » en est peut être l’exemple le plus spectaculaire et le plus spécifique.
C’est une grue mobile dépliable, véritable mécano roulant, qui va permettre de soulever sur le terrain des charges allant jusqu’à 20 t. («Strabokran » est l’abréviation de Strasse [route], Bock [portique] et Kran [grue]).
Pour tracter un tel engin, le semi-chenillé Sd.Kfz. 9 FAMO (18 t.) s’inscrit également dans le parc des équipements propres aux compagnies de dépannage lourd.
Enfin, des véhicules plus génériques, comme les camions Mercedes 4500 S et Ford V 3000, sont, eux-aussi, représentatifs de ces unités de maintenance.
Il se trouve que l’ensemble de ces matériels sont proposés au 1/87 par différents fabricants.
Il ne reste donc plus qu’a trouver les wagons pour les transporter, ce qui, s’agissant de matériel roulant allemand est assez facile à cette échelle !
Maintenance compagnie de chars lourds TIGRE 1 :
-C’est le fabricant Tchèque Hauler qui a la bonne idée de nous proposer ce modèle particulier composé à 95 % de pièces en photodécoupe.
Il n’en reste pas moins que le montage est assez complexe, surtout qu’il va s’agir de mettre cette grue en position de transport, option qui n’est pas proposée sur ce modèle.
J’ai considéré que l’originalité du modèle justifiait les efforts consentis !
-Les modèles de la série Roco/Herpa sont présentés « tout monté ».
Une première étape consiste donc à tout démonter, voire parfois décoller !
C’est le cas ici du Mercedes 4500 S...
On profite de cette étape pour apporter une série d’améliorations comme les tiges de gabarit (corde à piano de 0,2), les supports d’essuie-glace, le triangle de remorquage, les plaques d’immatriculation ou encore les vitrages de cabine.
Ce démontage général permet également d’affiner l’ensemble des pièces et de supprimer d’éventuelles lignes de moulage.
-Lorsqu’il s’agit d’une maquette comme le Famo de Trident, on progresse à l’inverse des modèles montés.
Après préparation des pièces, on assemble tout ce qui peut l’être avant peinture.
En s’appuyant sur une bonne documentation, le modèle est amélioré par l’ajout d’une série de détails (on note ici le début du travail sur la bâche arrière, élément absent du kit !).
Le chargement de la caisse est à rechercher dans votre boîte à rabiot, sauf le moteur qui provient du kit du Tigre.
Les axes métalliques (fil électrique de 0,5) plantés dans chacune des pièces faciliteront la mise en peinture.
Dans le train de roulement du semi chenillé, ils permettront également, une fois raccourcis, une fixation « propre » sur le wagon.
-Un essai « à blanc » est nécessaire afin de bien appairer le wagon à son chargement.
Sur le SSlma 44 de Brawa, il a fallu meuler les traverses de calage, moulées d’un seul bloc (métallique !) avec le platelage.
Quant à la « Strabokran », les principaux sous ensemble sont ici assemblés mais non montés.
Le train de roulement est à créer ex nihilo, puisque la position « transport » de la grue n’est pas proposée par Hauler !
Autant dire que pour ce modèle plus que pour les autres, il faudra vous armer d’une solide documentation !
-Les décalcomanies ne sont pas fournis, comme souvent à cette échelle.
Nous nous les sommes procuré chez tl-decals.com.
La lettre sur la portière qui apparaît comme un «J» majuscule est en fait un «I» en lettre gothique qui signifie «Instandsetzung», c’est à dire « maintenance » dans la langue de Goethe !
On trouve également au dessus de cette lettre la plaque d’identification militaire du véhicule.
-En utilisant de la bande cache pour protéger le châssis du wagon (ici le SSlma 44), on donne une teinte plus réaliste au platelage en bois qui avait pris un aspect métallique suite à nos travaux de ponçage !
Les nouvelles cales transversales sont elles aussi en bois... d’allumettes ou de cure-dents !
Elles sont mises en place en cohérence avec le calage du futur chargement.
-Autant que faire ce peut, je vous conseille de démonter les wagons pour pouvoir travailler sur les platelages, en particulier pour leur mise en peinture.
Ce n’est malheureusement pas toujours possible, surtout quand les principaux sous-ensembles sont clipsés.
Le risque de casse est élevé...
J’ai rapidement renoncé à mes tentatives sur les trois wagons dont aucun ne disposait d’un système de montage par vissage.
La sélection de vos wagons est intimement liée à la nature de leur chargement.
Mon idée initiale était de placer la grue et son tracteur sur un même wagon.
Les dimensions de la grue en position route m’ont rapidement convaincu que c’était une vue de l’esprit !
Un autre élément de sélection réside dans la cohérence des marquages par rapport à l’époque.
En ce qui concerne nos wagons plats, le souci de rentabilisation des moules allié à une carrière dans le monde réel souvent assez longue font que le code époque, qui fait référence dans le monde de la miniature ferroviaire, est parfois oublié sur certains réseaux !
Vue de l’ensemble du projet en phase de triage. Il ne manque plus qu’une BR 52 pour tracter le convoi...
La grue, comme le tracteur lourd et nos deux camions sont presque aussi importants que les chars eux mêmes.
Déployer les uns en l’absence des autres serait un non sens opérationnel.
Le SSlma 44 est intégré dans le convoi.
Comme pour les chars, lors d’un déplacement de jour, il est probable que la grue ait bénéficié d’un camouflage soigné à base de filets ou de branche d’arbres.
J’ai décidé de donner la priorité à la visibilité du travail en assumant pleinement cette entorse au réalisme !
Le convoi est reformé en gare de Savenay afin d’y ajouter d’autres chars (en arrière plan le Panther A de chez Trident).
La longueur du SSlma 44 contraste avec la compacité des Ssyms conçus spécifiquement pour le transport lourd.
Notre Mercedes 4500 S se contente d’un petit plat à ranchers, vieille référence Märklin dont le marquage SNCF doit cacher une origine germanique.
Le travail de vieillissement est nettement plus marqué sur ce wagon que sur les deux autres qui sont des modèles plus récemment mis en service.
Par ailleurs, nous sommes censé nous trouver sur un réseau français ; la présence de wagons appartenant à la SNCF est donc parfaitement logique.
Le convoi a repris son mouvement vers le front Normand. Il n’est manifestement pas le seul !
Le renfort visible sous le châssis du Ssl indique son importante capacité d’emport.
Le Ford V 3000 S et le Famo ne présentent pas de problème en matière de charge.
La bâche de caisse du Famo est à moitié ouverte, ce qui est peu probable compte tenu du vent relatif généré par le déplacement du convoi...
Là encore, j’assume cet écart au profit de la visibilité du chargement !
Ce chargement est composé de diverses caisses, de fûts de 200 l. et d’un moteur de rechange pour char Tigre.
Il s’agissait pour moi de renforcer visuellement la complémentarité de ce tracteur lourd avec les chars qu’il soutient.
Le Famo est un véhicule emblématique de l’industrie de guerre allemande : c’est un engin autant efficace et puissant qu’il est aussi coûteux et complexe !
Le Ford V 3000 S semble bien petit devant le Famo… et, de fait, c’est le cas !
La présence de la cabine frein sur le Ssl suppose une capacité d’embarquement / débarquement sur un quai en latéral.
Ce type d’infrastructure n’était pas des plus courantes sur un réseau qui, dans la région normande, avait par ailleurs fait l’objet d’une « attention » toute particulière de la part de l’aviation alliée.
Le Ford V 3000 appartient à la classe des camions de 3 t. de charge utile. Il a été produit pendant toute la durée du conflit avec quelques modifications mineures.
En France, après la guerre, il a continué d’être produit par l’usine Ford de Poissy.
Ainsi, par un retournement de l’histoire, il a aussi équipé l’armée française de la fin des années 40s.
Ce modèle peut donc être utilisé dans un contexte différent de celui proposé par Roco.
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-25 septembre / 2 octobre 2021 :
"Zur Normandie Front"
(Première partie)
Tiger 1 Ausf. E (SdKfz 181) sur plats SSyms
(1944 / Époque 2)
(1/87 - par Thomas Seignon)
Ayant finalement compris que le débarquement allié en Normandie n’était pas une diversion, le commandement allemand va mobiliser les unités disponibles pour faire face à ce nouveau front.
Le train constitue un vecteur privilégié pour assurer la convergence de ces forces, plus particulièrement lorsqu’il s’agit d’unités blindées et a fortiori lorsqu’il s’agit d’unités de chars lourds.
Un tel mouvement par voie ferrée constitue en soi une véritable opération. D’abord parce qu’il s’effectue sous la double menace de l’aviation alliée et de la Résistance ; ensuite, parce que des engins de 56t. comme le Tigre 1 nécessitent non seulement l’emploi de wagons spéciaux, mais aussi la mise en place d’un jeu de chenilles étroites (afin de respecter le gabarit) et l’accompagnement par un matériel spécifique lié à la maintenance des chars sur le terrain…
C’est ce challenge que je vous propose de relever, en réduisant le tout au 1/87... et dans un contexte heureusement plus apaisé !
A/ Le wagon
-De nombreuses marques ont reproduit le plat SSyms.
J’ai retenu la proposition de Liliput qui, bien que n’étant pas la plus détaillée, offre l’avantage d’être aisément démontable et dont le platelage en plastique moulé, peut être facilement percé.
Cela va s’avérer très utile lorsqu’il s’agira de fixer efficacement un véhicule et des personnages sur le wagon.
-L’ensemble du platelage est repris en peinture à partir du set « weathered wood » de Lifecolor.
Il s’agit de redonner au bois une variation chromatique plus proche de la réalité.
A ce stade les nuances claires doivent dominer.
L’ensemble est ensuite protégé par une couche de vernis mat.
-Il s’ensuit un double traitement : tout d’abord des petites touches de peintures à l’huile sélectionnées dans des nuances cohérentes avec votre platelage et qui seront immédiatement diluées à l’aide d’un pinceau plat trempé dans de l’essence à briquet.
Ensuite, après une nouveau voile de vernis mat et 24 heures de séchage, on dilue du pigment pur (ici du noir) avec la même essence à briquet, ce qui va contribuer à faire ressortir le relief du platelage.
-On s’intéresse ensuite à la carcasse du wagon dont on va "casser" le noir du plastique neuf à l’aide d’un kit de "maquillage" de chez Tamiya, d’une teinte « fumée » de chez "Prince August", diluée et diffusée en voile à l’aérographe, ainsi que de pigments simulant l’empoussiérage.
Attention à ne pas trop en faire en matière de vieillissement !
A l’été 1944, ces wagons sont récents.
-Avant / après : notre wagon est prêt à accueillir son chargement.
Les deux petits trous de 0,5mm au milieu et de part et d’autre du wagon sont destinés à recevoir le train de roulement du char et assurer ainsi une fixation solide et discrète de l’engin sur son support.
Je vous conseille des essais à blanc avant d’entamer les travaux de vieillissement du wagon comme du char.
-La dernière touche consiste à placer le train de chenille de combat au centre du wagon.
Il a fallu à cet effet dupliquer à une cinquantaine d’exemplaire le morceau de chenille de rechange fourni dans le kit du char afin de réaliser des train de chenilles (presque) complets !
La torsion de la chenille à l’avant du wagon est réalisée par trempage du morceau de chenille en résine dans de l’eau bouillante... 2 à 3 secondes suffisent.
B /Le char
-L’artisan allemand ARTITEC s’est nettement inspiré du modèle ROCO/HERPA pour proposer son Tigre 1.
Il offre néanmoins quelques détails supplémentaires comme le moteur et la reproduction de la pâte antimagnétique (Zimmerit) qui recouvre la caisse et la tourelle.
Contrairement à ce qui est écrit sur la boîte, il ne s’agit pas d’un modèle tardif (spät) mais d’un modèle intermédiaire, encore doté du train de roulement dont les galets disposent d’une bande de caoutchouc, avant le remplacement par des galets entièrement métalliques dans un ensemble plus compact.
-On est ici au coeur du challenge avec la modification du train de roulement qui passe des chenilles de combat (ici en marron) aux chenilles d’embarquement (ici en sable).
Les deux rangs extérieur de galets sont éliminés en prenant soin de préserver un exemplaire extérieur pour le surmouler, on ajoute des dents au barbotin et on détaille les axes de fixation sur les rangs de galets restant...
Vaste programme avec une documentation solide à l’appui !
-La comparaison est encore plus spectaculaire sur la face interne du train de roulement.
On retrouve les galets extérieurs surmoulés qui viennent prendre place du côté interne afin de compléter le travail.
D’aucun me diront que cette partie ne sera pas la plus visible une fois le modèle en place sur le wagon... Certes, mais elle illustre bien la difficulté majeure inhérente au projet.
-Pour autant le travail à effectuer sur la caisse n’est pas anodin.
Au premier plan la caisse « sortie de boîte » à comparer avec, au second plan, la même après modifications : suppression des jupes latérales, relevage des ailes avant et arrière, fixation des élingues, axes de mise en place du train de chenilles… Autant d’éléments qui viennent confirmer, là encore, la nécessité d’une bonne documentation !
-Le même sujet vu sous un autre angle : à gauche la caisse « sortie de boîte » et à droite la même caisse après modification.
A noter ici le détaillage de l’intérieur du volet pilote, le phare unique en position centrale (qui correspond aux engins vus en Normandie au sein de l’unité retenue pour nos travaux) et la mitrailleuse de caisse avantageusement remplacée par un morceau de seringue.
-La couche de base est réalisée à l’aérographe en prenant soin de diluer et d’éclaircir la teinte de référence (en l’occurence « jaune panzer » de Prince August).
On y ajoute quelques zones encore plus claires sur la partie supérieure de la caisse.
A cette échelle, il ne faut pas craindre de commencer avec une teinte très claire par rapport à l’effet final recherché, ne serait ce que parce que tout le reste du travail va contribuer à l’assombrir !
-Vient ensuite le camouflage à base de brun et de vert clair (références Prince August) illustré ici sur la tourelle.
Là encore éclaircissement/dilution des teintes et main légère sur l’aérographe sont les clés de la réussite.
N’hésitez pas à vous faire la main sur un modèle « sacrifié » avant de passer à l’acte !
Les décalcomanies ne sont quasiment jamais fournis par les fabricants quels qu’ils soient à cette échelle…
Nous nous sommes donc retournés vers le magasin allemand TL Modellbau (tl-decals.com) qui propose une belle série de planches de décalcomanies adaptées à de nombreux sujets militaires.
-Après avoir protégé l’ensemble par une couche de vernis mat, nous passons au traitement par touches de peintures à l’huile diluées (vert sombre/terre de sienne/ombre brûlée) et pigment suivant le même procédé que celui appliqué au wagon.
On visualise bien l’effet d’assombrissement général tout en contribuant à un bien meilleur rendu des reliefs.
C/ L’ensemble sur le réseau
-Au premier plan, sur le triage de Savenay, nos deux Tigres objet de la première partie de notre projet.
Les trois wagons du deuxième plan constituent la seconde partie et feront l’objet d’un prochain article.
J’ai ajouté quelques personnages de tankistes issus d’une boîte d’origine Preiser afin de donner un peu de vie à nos deux monstres de métal.
-Notre convoi est en mouvement...
Des chars de ce type sont prioritaires sur tous les autres chargement en matière de gestion des voies ; le convoi du second plan est donc à l’arrêt en attendant le passage de nos chars.
J’ai utilisé une véritable chaînette pour l’arrimage des engins, ce qui évite d’avoir recours à des solutions à base de photodécoupe qui manquent naturellement de relief.
-La position de la tourelle « à 6 heures » (tournée vers l’arrière) fait partie des consignes d’embarquement réglementaires pour les Tigres.
La présence de l’équipage auprès de son engin est également normale, au cas où un débarquement d’urgence serait nécessaire.
C’est aussi l’occasion de mettre en valeur la finesse des personnages Preiser !
-Le char 133 (3ème char du 3ème peloton de la première compagnie… car ces chiffres ont un sens !) vu de l’avant.
On imagine le travail que représente le passage des chenilles de combat aux chenilles d’embarquement pour un équipage.
Il ne faut pas compter moins d’une demi journée pour embarquer une compagnie complète et ce avec l’aide de moyens complémentaires.
-Le char 131 dans une zone de triage qui semble particulièrement chargée !
Reconnaissons qu’une telle concentration en plein jour dans une période où le ciel est dominé par l’aviation alliée est assez peu réaliste.
En fait, les mouvements ont souvent lieu de nuit et les photos d’époque prises de jour présentent des véhicules généralement couverts de branchages... mais vous montrer une masse sombre dans l’obscurité aurait été frustrant !
-Vue aérienne du char 131...
Comme dans la réalité, les chenilles d’embarquement permettent de rester dans le gabarit... à quelques centimètres près !
Ce respect des contraintes techniques était particulièrement nécessaire sur les réseaux de l’Europe de l’ouest ; c’était beaucoup moins vrai sur le front de l’est, où il n’est pas rare de voir des Tigres embarqués avec leur chenilles de combat.